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Le projet multimédia constitue :
"un regard sur un autre soi qui va rentrer dans l'histoire, à la manière d’un Chris Marker dans les groupes Medvedkine."
Il fait aussi référence à Alexandre Medvedkine et son fameux ciné-train.
Je cherche sur Google et j’apprends beaucoup sur cette personnage emblématique du cinéma documentaire et ce pionnier des nouveau médias, décède il y a quelques jours : "Grand voyageur, grand compagnon des causes révolutionnaires, grand explorateur des technologies de l'image, il rapporte de ces divers fronts une œuvre en mouvement, ouverte au doute, à l'humour et à la mélancolie..." (Le Monde 31.07.2012 : http://www.lemonde.fr/disparitions/article/2012/07/31/chris-marker-derniere-eclipse_1740452_3382.html )
J'ai compris que Chris Marker s'inscrit dans la tradition d'un Majakowski, Sergej Tretjakow, Meyerholt, Piscator, Brecht, Walter Benjamin - Medvedkine ... Fin des années 1920 il y avait maintes débats et essays pour créer un nouveau art populaire, Medvedkine et son ciné-train faisait partie de ces initiatives.
Un des textes les plus précis sur ce sujet, publié en 1930 est la préface de Bertolt Brecht pour l’opéra «Grandeur et décadence de la ville de Mahagonny». Une traduction en français de ce texte était publié 1972 dans les "Cahiers du cinéma". Dans ce texte Brecht explique en détail les principes d'un art (en l'occurrence le théâtre) populaire et émancipateur et la nécessité de développer un mode de production (et de distribution) adapté pour ces œuvres :
"... Et pourtant, chez les travailleurs intellectuels, subsiste encore cette illusion que tout le commerce des grands appareils ne sert qu'à faire valoir leur travail ; que loin d'influer sur lui, ce processus, jugé secondaire, permettrait au contraire à leur travail d'exercer une influence.
  Cette inconscience de leur situation a d'énormes conséquences, auxquelles il est prêté trop peu attention. Convaincus de posséder ce qui en réalité les possède, compositeurs, écrivains et critiques défendent un appareil qu'ils ne contrôlent plus ; un instrument qui n'est plus, comme ils le croient encore, au service des producteurs, mais qui, au contraire, s'est tourné contre eux, donc contre leur propre production (dès que celle-ci présente des tendances spécifiques et nouvelles, non conformes, ou même opposées à l'appareil). Leur production n'est plus qu'un travail de fournisseurs, et l'on voit naître une notion de valeur dont le fondement est la rentabilité commerciale. De là cette habitude d'examiner chaque œuvre en fonction de sa convenance à l'appareil, mais jamais l'appareil en fonction de son adéquation à l'œuvre."
Dans la discussion sur l'art populaire et antifasciste ce texte du Brecht a été souvent cité, p.ex. par Walter Benjamin dans son essai "L'auteur comme producteur", ou bien dans le fameux essai de Benjamin "L’œuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité technique" : Le mode de production d'un œuvre d'art est décisive pour son caractère et sa fonction: Pour produire une culture populaire il ne suffit pas de créer un nouveau "contenu populaire", on a besoin le développement des nouvelles modes de production de cette culture. Comme il a fait Medvedkine - et plus tard les "groupes Medvedkine" initié par Chris Marker.
Une traduction française de ce texte formidable de Brecht se trouve actuellement ici:https://sites.google.com/site/antoinestalker/%C2%ABgrandeuretd%C3%A9cadencedelavilledemahagonnyCette version est pas bien lisible et comme c'est pas sure que cette page web sécurise soit accessible pour longtemps et de partout, j'ai mis ce texte aussi ici:
http://atelier-luca.com/fc/viewtopic.php?t=1171
(mot de passe : cldt )
La manière de Chris Marker
C'est quoi exactement la "manière d'un Chris Marker" ?
a) Il y a la dimension technique, développée par Alexandre Medvedkine les années 1930 : "tourner le jour, tirer et monter pendant la nuit, projeter le lendemain aux gens même qu'il avait filmés, et qui souvent avaient participé au tournage. ... J'ai encore retrouvé le syndrome Medvedkine dans un camp de réfugiés bosniaques en 1993, des mômes qui avaient appris tous les trucs de la télé, avec présentateurs et génériques à effet, en piratant sur le satellite et grâce à un peu de matos offert par une ONG  mais qui ne copiaient pas le langage dominant, ils en utilisaient les codes pour être crédibles et se réappropriaient l'information à l'usage des autres réfugiés. Une expérience exemplaire. Ils avaient les outils, et ils avaient la nécessité. Les deux sont indispensables."
Ce "syndrome Medvedkine" permet de créer un processus de production et de diffusion locale. En utilisant cette méthode de production il y a la dimension emanzipatoire:
b) "Je crois bien que c'est cette histoire fabuleuse (le ciné-train de Alexandre Medvedkine) et longtemps ignorée ... qui sous-tend une grande part de mon travail, peut-être la seule cohérente après tout. Essayer de donner la parole aux gens qui ne l'ont pas, et quand c'est possible les aider à trouver leurs moyens d'expression. C'était les ouvriers de 1967 à la Rhodia, mais aussi les Kosovars que j'ai filmés en l'an 2000, qu'on n'avait jamais entendus à la télévision ..."
(ces deux passages viennent d'un interview avec Chris Marker 2005, voir
http://next.liberation.fr/cinema/0101466984-rare-marker)
Il est évident qu'il ne s'agit pas de imiter mécaniquement les méthodes de Medvedkine et Chris Marker. Mais je pense c'est utile de revoir les intentions et les expériences et discuter certaines détails du fonctionnement.
Pour s'informer en détail, j'ai trouvé deux bonnes sources en anglais:
Pour des sources en français, voir:
En français aussi les (rares) interviews avec Chris Marker dans le superbe site suisse http://chrismarker.ch p.ex:
Il est intéressant que Chris Marker, pionnier du cinéma documentaire, a été dès le début fasciné des possibilités des nouveaux médias comme DVD, Hypercard, Internet etc. Voir aussi ses propos sur l'écriture non-linéaire dans les interviews au dessus.
Voir aussi un article très informatif sur le ciné-train de Medvedkine dans le blog du GRHED (Histoire et esthétique du cinéma documentaire/Paris 1 – CERHEC)
Quelles pourraient être les concrétisations 2013 ? La "manière de Chris Marker" concerne au premier plan les images filmés, leur montage et l'organisation de produire ces images. Mais la présentation doit correspondre a l'esprit: la façon ces images sont intègrés dans le site et comment ils sont accessible.
Je pense p.ex. aux images des spectateurs français devant les vitrines avec des statues africaines dans le le documentaire "Les statues meurent aussi" réalisé par Chris Marker et Alain Resnais 1950 - 1953 sur la relation qu'entretient l'Occident avec un art nègre qu'elle vise à détruire sans même s'en rendre compte.
"Quand les hommes sont morts, ils entrent dans l'histoire. Quand les statues sont mortes, elles entrent dans l'art. Cette botanique de la mort, c'est ce que nous appelons la culture."
C'est ainsi que commence ce documentaire, interdit en France entre 1953 et 1965.
(voir le film : http://www.youtube.com/watch?v=dFn2dIQsFu0 - soustitres en espagnol)Â
Donner la parole aux gens qui ne l'ont pas
En ce qui concerne les parties du site lié étroitement a la dimension "donner la parole aux gens qui ne l'ont pas" (Il y a bien d'autres) quelques points a reflechir, p.ex. :
Une vaste Plate-forme ouverte
La production technique des films des "groupe Medvedkines" a été soutenu par la SLON « Société pour le Lancement des Å’uvres Nouvelles ». La SLON, crée en 1967 par Chris Marker devient en 1974 ISKRA (Images, Son, Kinescope, Réalisation Audiovisuelle). Comme l'explique un texte du collectif de 1971,
"SLON est née d'une évidence: que les structures traditionnelles du cinéma, par le rôle prédominant qu'elles attribuent à l'argent, constituent en elles-mêmes une censure plus lourde que toutes les censures. D'où SLON, qui n'est pas une entreprise, mais un outil - qui se définit par ceux qui y participent concrètement - et qui se justifie par le catalogue de ses films, des films QUI NE DEVRAIENT PAS EXISTER !."
La plate-forme d'un "Monde en Mouvement(s) " une "vaste plate-forme audiovisuelle ouverte" pourrait jouer un telle rôle. Mais ce plate-forme offrirait pas seulement la possibilité de publication internet, la seule publication internet n'est plus difficile à réaliser, voir Facebook etc. Les personnes impliquées dans la maintenance de ce plate-forme pourraient offrir un "aide technique", pourraient donner un soutien pratique aux acteurs locales, p.ex aux organisations locales qui ont un but correspondant, donner un coup de main pour aider à la distribution ciblé, préparation des médias non-internet.
Il faudrait donc prévoir dès le début une telle co-operation et développer les modes d’opération, je pense.Â